Patrick Roger, le chocolatier électron libre
Puriste et rebelle, consacré Meilleur Ouvrier de France chocolatier en 2000, Patrick Roger n’a pas sacrifié l’authenticité et la subtilité de ses chocolats à la rentabilité ou la gloire. Exigeant et passionné, l’artiste est à l’image de ses sculptures : humain, sensible et atypique. Entre l’ouverture de sa nouvelle boutique Boulevard Saint Germain, les différentes expositions de ces œuvres d’ici la fin de l’année et la sortie de ses collections pour les fêtes, Patrick Roger répond, sans filtre, à nos questions.
La décoration de vos boutiques et particulièrement la dernière en date, bouscule les codes des boutiques traditionnelles, pourquoi ce choix ?
Cela a toujours été le cas ! En fait, je ne me suis jamais occupé de ce qui se faisait ailleurs. C’est d’abord le lieu qui m’inspire et qui va inspirer la décoration de la boutique. C’est pour cela qu’aucune de mes boutiques ne se ressemblent. Finalement c’est assez compliqué de ne pas se dupliquer mais c’est aussi un challenge très motivant. Et oui je change d’architecte à chaque fois ! Ce changement est souvent dû à un désaccord avec l’architecte. Je sais ce que je veux et à force de faire des travaux dans mes boutiques et atelier je connais assez bien les contraintes mais je suis obligé de faire appel à un architecte pour des raisons légales…
La matière première vous inspire beaucoup dans vos créations, en matière de décoration qu’elles sont celles qui vous inspirent ?
Aujourd’hui le verre et le béton m’inspirent beaucoup pour la construction. Maintenant j’utilise aussi d’autres matières comme le bois et la paille qui sont, en matière d’isolation, des produits excellents et c’est bon pour l’environnement. D’ailleurs je les ai utilisés dans l’isolation de mon atelier et ma maison est isolée avec 10 cm de torchis. Je suis très sensible à l’environnement et j’essaye que mes boutiques, ma maison ou mon atelier le respectent au mieux. Mais avec les obligations légales entre les normes d’hygiène, de sécurité…c’est très compliqué. En fait je suis un terrien et je suis sensible à la protection de la planète, j’ai besoin de mes patates !
« Je suis un rebelle en décoration. »
Quand on regarde votre parcours, vous apparaissez comme un rebelle, est-ce qu’en matière de décoration l’êtes-vous aussi ?
Je suis libre, extrême libre ! En fait, pour moi, la décoration doit répondre à un besoin et on doit avoir une vision globale. Je pense aussi que la technique et le design fonctionne très bien. Alors, oui je suis un rebelle en décoration.
Votre devise “L’art du goût ou le goût de l’Art” va s’exposer au musée Rodin mais également à la galerie Nikki Diana Marquardt, était-ce pour vous une évidence ce pont entre Art et artisanat ?
Ce n’est pas tant ce “pont” qui est compliqué, mais plutôt d’exposer à Paris ! C’est un milieu très fermé qui a ses codes. Résultat, c’est un vrai parcours du combattant pour qu’une galerie accepte d’exposer et c’est très cher. Autre difficulté, c’est de trouver une fonderie qui puisse répondre à la demande des artistes. Je suis obligé d’aller en Allemagne ou en Suisse pour réaliser mes sculptures. D’ailleurs ma première sculpture “Harold” a été réalisée en Suisse.
Vos créations comme “Déshabillez-moi” sont très colorées, qu’elles sont celles qui vous inspirent le plus ? Et matière de décoration ?
La couleur que j’aime le moins, car elle me fait peur, c’est le bleu. Et pourtant j’ai réalisé “Cyclone” (demi sphère en chocolat), peut être pour combattre ma peur… A l’inverse j’aime beaucoup le vert comme l’émeraude brut. Mais sinon je suis ouvert à tout. Chez moi c’est plus de choix basés sur un aspect de solidité comme le blanc et l’anthracite. Dans mes boutiques, je choisis la couleur, ou la non-couleur, pour qu’elles soient des écrins pour mes chocolats.
Si vous étiez…
Un luminaire : un spot qui éclaire trop fort
Une table : un plateau très simple avec des pieds en aluminium et un grand plateau
Une sculpture : l’araignée
Un canapé : un molteni
Boutique au 108, Boulevard Saint Germain, 75006 Paris. Exposition : L’Hommage à Rodin, jusqu’au 20 février 2016. Musée Rodin, 79, rue de Varenne, 75007 Paris.